Maîtriser son corps, sa voix, apprendre à imposer son charisme mais sans en faire trop dans
une ambiance ludique et participative… Et si la pratique théâtrale recelait d’outils très utiles
pour naviguer sereinement dans l’univers professionnel ? Trois formateurs-acteurs nous en
donnent quelques exemples, cas concrets à l’appui.
Jouer avec son corps
Même sans rien dire, on peut exprimer beaucoup. Et parfois exactement le contraire de ce
qu’on pense. Vincent Priou Delamarre, acteur et scénariste chez Théâtre à la Carte, se
souvient de cet entretien entre un collaborateur et son supérieur : « Le patron lui a dit : «
vas-y je t’écoute », mais il est resté fixé sur son ordinateur… » ! Ces décalages entre ce que
l’on fait et le message que l’on souhaite faire passer sont courants. D’où l’intérêt de
travailler sa posture et d’apprendre à maîtriser sa communication non-verbale.« Pour
commencer, il ne faut pas s’excuser d’être là ! », lance Aude Diano, comédienne et
fondatrice-dirigeante d’Impro2. Alors, on essaie d’« ouvrir les épaules et de sourire net ». «
Chacun doit identifier son truc (bouger beaucoup ou être statique par exemple) et éliminer
les gestes parasites (passer d’un pied sur l’autre, faire claquer les bouchons de stylo…) »,
ajoute Isabelle Censier, metteur en scène, actrice et co-fondatrice d’Ici prod. Elle se souvient
de cet homme terrorisé à l’idée de parler devant 200 personnes. Ensemble, ils ont travaillé
sur les appuis qui le mettaient à l’aise. « Du coup, il savait ce qui le mettait en confiance
physiquement. » Au cours de mises en situations professionnelles, Aude Diano joue des
personnalités différentes avec ses participantes. « Ca leur permet de tester les bonnes
attitudes, explique la comédienne dirigeante. C’est comme faire des gammes. »
La voix, un instrument
Pendant les stages de formation, comme le feraient les acteurs, les participants sont amenés
à travailler leur voix. À la placer. « Il arrive que les femmes renvoient une voix agressive,
aigüe », raconte Isabelle Censier. Le boulot est alors d’« apprivoiser une voix soutenue,
placée et de travailler sur sa respiration ventrale ». Comme pour cette femme, dont les
requêtes adressées à sa collaboratrice directe ne passaient pas, car elle le faisait de façon
tendue. Avec Isabelle Censier, elles ont fait en sorte qu’elle « prenne le temps de dire les
choses, d’articuler, d’être dans le naturel travaillé. Il faut se servir de soi, de sa voix, comme
d’un instrument ! », insiste la formatrice. Et c’est d’autant plus utile qu’in fine, on acquiert
une sensation interne de confiance en soi, garantit-elle. Parmi ses nombreux trucs pour
travailler la voix : « parler en imaginant que l’on s’adresse aussi à quelqu’un qui est derrière
nous » et « placer sa voix dans des situations sans tension » (un verre avec des copines par
exemple).
Mais il faut aussi intégrer l’importance de l’écoute ! « Les femmes que je vois en stage
veulent être parfaites, avoir raison, indique Aude Diano. Mais la stratégie gagnante, c’est
d’être à l’écoute, de s’adapter à son interlocuteur ! » Un constat confirmé par Vincent Priou
Delamarre : « souvent, les managers me demandent quoi faire si quelqu’un fond en larmes
dans leur bureau. Or, dans 80% des situations, écouter c’est résoudre 50% du problème. »
D’autant que « plus vous avez une capacité d’écoute active, plus il est facile de
communiquer. »
Apprendre de l’effet miroir
« Quand on joue des saynètes, explique Vincent Priou Delamarre, ils expliquent ce qu’ils ont
pensé de la situation et en général ils parlent d’eux en creux, font des ponts avec leur réalité
professionnelle. » Une façon de prendre conscience des difficultés, des points forts et aussi
des points d’achoppement avec son manager ou ses collaborateurs. Mais l’effet miroir existe
aussi quand ce sont les stagiaires qui se mettent en situation. Après les exercices
d’improvisation individuelle proposés par Aude Diano, chacune des participantes, « en toute
bienveillance », qualifie la prestation qu’elles viennent de voir. Ce qui facilite la prise de
conscience, sans violence, de telle ou telle attitudes. « Elles sont un miroir les unes pour les
autres. Dans la vraie vie, c’est rare… Elles se découvrent », précise la comédienne-dirigeante.
Auteur de cet article : Clémence Leveau
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